Quand ton cerveau pipeaute les raisons de tes choix

Trois expériences pour explorer notre "cécité au choix"

Est-on (vraiment) sûr que les raisons de nos choix soient les véritables raisons ?

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Des choix, tu en fais tous les jours.

Des simples.

Des compliqués.

 

Mais est-ce que tu peux les justifier ?

Vraiment les justifier ?

Et est-ce que ta justification est juste ?

Ou alors rationnelle ?

 

Je sais, ce sont des questions un peu bizarres.

Mais tu dois avoir l’habitude désormais 😅 

Aujourd'hui, je vais te parler de deux chercheurs :

Lars Hall et Peter Johansson

Ils challengent notre capacité à justifier nos choix.

Ou plutôt, la justesse et la rationalité de nos justifications.

 

Et cela peut avoir des conséquences assez importantes sur la manière dont nous considérons nos choix.

Et sur la manière dont nous les expliquons.

Que ce soit à nous-mêmes ou aux autres.

En avant pour 3 expériences surprenantes ! 

Première expérience : les visages

La première expérience que Peter Johansson et Lars Hall ont effectué est intéressante :

On montre deux photos de visages à un participant.

Il doit choisir une des deux photos en la pointant du doigt.

Le chercheur met de côté la photo sélectionnée en la faisant glisser vers le participant.

De temps en temps, le chercheur demande : "pourquoi vous avez préféré celle-là ?"

Le participant reprend (généralement) la photo et s'explique.

Jusque-là, c'est assez ennuyeux.

Mais les chercheurs ont ajouté un twist !

Parfois, ils utilisent une technique de magicien pour faire glisser la photo qui n'a pas été choisie par le participant !

Juste avant de leur demander de se justifier sur leur choix.

Écrit comme ça, je suis sûr que ça te paraît complètement fou.

Qui ne remarquerait pas la supercherie ?

Ben…

20% des participants.

Et si tu ne me crois toujours pas, tu peux regarder la reproduction de l’expérience faite par la BBC. (Vidéo en anglais)

Tu verras comment ça se passe, et comment les résultats sont probants.

 

La première surprise est donc que peu de personne ne remarque la supercherie.

C’est déjà pas mal.

 

Mais la deuxième surprise est encore mieux !

Les participants justifient régulièrement leur (faux) choix de photo basé sur les caractéristiques physique dans la photo !

Par exemple, on montre la photo d'une personne brune et celle d'une personne blonde.

Le participant pointe vers la personne brune.

On lui donne, via le trucage de magicien, la photo de la personne blonde.

On lui demande les raisons de son “choix.”

Le participant regarde à nouveau la photo (échangée cette fois) et dit : “j'aime bien les personnes blondes.”

Clairement, cela ne peut pas être la raison de son choix initial !

Mais son choix initial semble être complètement inaccessible.

Son cerveau a fait un choix.

On le trompe pour lui faire croire qu'il reçoit le résultat de son choix.

Et quand on lui demande de s'expliquer, on en dirait qu'il crée quelque chose sur le moment.

Plutôt que de trouver les “vraies” raisons pour lesquelles il avait fait le choix initial…

De la post-rationalisation de haut niveau !

Johansson et Hall ont nommé ce phénomène “cécité au choix.”

Je ne sais pas toi,

Mais je trouve fascinant que notre cerveau soit capable de nous tromper jusqu’à expliquer des choix qu'on n'a pas vraiment fait !

Deuxième expérience : les confitures

On reprend les mêmes chercheurs, mais cette fois, on va dans un supermarché.

Ici, ils prétendent tenir un stand de dégustation de confitures.

Deux choix : confiture au cassis, et confiture à la framboise.

 

On prend les passants du supermarché,

Et on leur propose de goûter les deux confitures.

Les chercheurs leur demandent laquelle ils préfèrent.

Puis ils leur proposent de goûter à nouveau la confiture qu'ils préfèrent.

Puis on leur demande de justifier leur préférence.

 

Tu t’en doutes déjà, comme dans la première expérience, il y a un subterfuge.

À la deuxième dégustation, un trucage permet de faire goûter la confiture qui n'est pas été choisie initialement.

 

Donc si tu avais goûté framboise et cassis,

Que tu me dis que tu préfères la framboise,

Je te fais goûter le cassis en prétendant que c’est la framboise.

 

Les pots de confiture sont opaques,

Et on contrôle la quantité et l’attention pour éviter de détecter la supercherie via les couleurs.

 

Là encore, beaucoup de personnes ne se rendent pas compte du changement.

 

Et là encore, les explications portent sur des caractéristiques physiques.

 

Et donc clairement, ça ne peut être les véritables explications.

Et si tu ne me crois toujours pas, regarde cette vidéo de la BBC (vidéo encore en anglais) ou lit l’article originel (anglais encore et toujours.)

Oui mais…

Jusque-là, tu me diras :

“Bon ok, on justifie mal nos choix.

Mais dans la “vraie” vie, on n'a pas à choisir des photos comme ça.

Ni de tester et retester des confitures en se faisant duper.

Donc, c'est intéressant en soi,

Mais ce n'est pas critique.”

Je te comprends.

Mais que dire des personnes qui disaient : “c’est cette personne que j’irai voir dans un bar” ?

(Alors qu’ils avaient choisi quelqu’un d’autre au départ)

Ça risque quand même de changer une vie !

(Lancez les violons de n’importe quel film romantique 😂)

Passons à un sujet beaucoup plus sensible :

Troisième expérience : le choix politique

Cette fois, ça devient plus sérieux.

 

Pour cette expérience, petite mise en contexte.

Elle a été réalisée en Suède où il y a deux grands blocs politiques (droite et gauche.)

Et il est habituel pour les médias de publier des “boussoles” :

Des listes de questions clivantes,

Portant sur les propositions des deux grands blocs,

Afin d’aider les citoyens à savoir où ils se situent.

 

 

Cette fois, les chercheurs se font passer pour des bénévoles proposant un sondage :

On interpelle quelqu’un dans la rue,

On lui demande ses intentions de vote,

On lui donne un questionnaire à remplir (la “boussole,”)

En utilisant un trucage, on lui présente “ses” résultats mais avec les résultats opposés,

On lui demande de justifier ses choix,

On calcule ensuite “son” orientation politique (à l’opposé de son intention initiale,)

On lui demande de commenter “son” orientation.

Donc imaginons :

Tu indiques voter à gauche.

Tu réponds à une série de questions (en mode d’accord / tout à fait d’accord / pas d’accord / pas du tout d’accord.)

La chercheuse prend tes réponses puis te “les montre” en te demandant de justifier chacun de tes choix.

Elle ajoute un masque avec des couleurs sur “tes” réponses et calcule que tu votes à droite.

Elle te demande de te justifier à nouveau.

 

Oui je sais.

Là aussi, ça paraît fou de se dire que personne ne remarque la supercherie.

Mais désormais, tu sais que c’est possible 😅

Car oui, comme pour les expériences précédentes, peu de personnes ne remarquent les modifications.

Sauf pour quelques exceptions.

(J’imagine pour les causes sur lesquelles les personnes sont les plus engagées.

La justification étant d’ailleurs souvent : “je n’ai pas dû bien comprendre votre question.”)

Mais dans la grande majorité, aucune détection du subterfuge.

 

Et comme pour les expériences précédentes, les justifications fournies sont très intéressantes.

Cette fois, plus question de caractéristiques physiques.

Chaque participant justifie “son nouveau positionnement” de manière logique et argumentée.

En utilisant des informations disponibles à son esprit.

Par exemple :

“La surveillance de masse des téléphones permettrait de lutter contre les trafiquants de drogue.

J’ai lu un article qui parlait d’un chef de gang qui restait connecté à ses équipes depuis sa prison.

Je n’aime pas qu’on ait accès à tout ce que je fais mais ça peut valoir le coup.”

Sachant que la personne avait indiqué l’avis opposé,

C’est bluffant non ?

 

Si tu veux lire l’article complet de cette dernière expérience, c’est par ici.

 

Note : cette expérience n’est évidemment pas à reproduire pour changer les votes d’une personne !

Dans le cadre scientifique, les chercheurs ont expliqué à tous les participants ce qu’il s’était passé,

Et leur ont proposé de modifier leurs avis à la fin.

Du coup, on fait quoi de tout ça ?

Dans le TEDx où il explique ses résultats de recherche,

Petter Johansson indique voir cela positivement.

Nous pouvons être flexibles dans nos avis.

Même lorsque nous exprimons le contraire.

Idem pour les “autres” : leur avis peut être changé.

Mais il faut d’abord accepter de voir le point de vue opposé au sien.

Un véritable appel à l’ouverture !

Si tu veux voir le TEDx de Petter Johansson, c’est par ici. (Vidéo en anglais mais avec sous-titres français.)

Défi de la semaine

Prends 1 ou 2 choix que tu as l’intention de faire prochainement.

Note sur une feuille les raisons qui te viennent à l’esprit pour justifier chaque choix.

Mets là de côté.

Le lendemain, imagine que tu fais le choix opposé.

Note sur une nouvelle feuille les raisons qui te viennent à l’esprit pour justifier ce nouveau choix.

Puis compare les deux feuilles 😊

Tes commentaires m’intéressent !

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Je suis à ton écoute et je te répondrai avec plaisir.

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