Cerveau vs planète : combat perdu d'avance ?

Ou comment notre cerveau nous pousse (ou pas) à détruire notre maison

Une triste réalité créée par nos automatismes cérébraux ?

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Est-ce que tu as déjà entendu cette thèse ?

Nous serions programmés pour la destruction de la planète.

Plus particulièrement :

Une partie archaïque de notre cerveau, le striatum, piloterait nos choix vers plus de consommation de ressources et plus de recherche de pouvoir,

Sans regarder l’impact à moyen ou long-terme.

C’est la thèse du livre Le Bug Humain publié en 2019.

Le livre, et sa thèse, ont eu pas mal de succès et tu peux les retrouver cités dans plusieurs autres ouvrages.

Est-elle véritablement fondée ?

Est-ce que notre cerveau ne nous piégerait-il pas à nouveau ?

Commençons par le commencement.

Quelle est cette thèse ?

Aujourd’hui souvent nommé la thèse du striatum, elle est principalement défendue par l’auteur du livre : Sébastien Bohler.

Il est docteur en neurobiologie (mais sans être chercheur ou académique,) journaliste scientifique et rédacteur en chef de la revue Cerveau & Psycho.

Sur la base d’études en biologie, sociologie et psychologie,

Il avance les points suivants :

  • Le striatum est une structure cérébrale qui joue un rôle clé dans toutes les décisions que notre cerveau prend au quotidien,

  • Il est fortement lié (voire commanderait) le circuit de la récompense (à base de dopamine,)

  • Nous possédons une zone qui nous permet de planifier et de prendre du recul : le cortex préfrontal,

  • Le striatum contrôlerait également le cortex préfrontal,

  • Le striatum cherche à assouvir cinq besoins fondamentaux : manger, se reproduire, asseoir du pouvoir, acquérir de l’information, et fournir le moindre effort.

L’auteur observe également que nos comportements au quotidien collent avec les cinq besoins que notre striatum cherche à satisfaire.

Ce qui l’amène à conclure que notre cerveau comporte un bug : nous sommes programmés pour consommer à l’infini, quitte à détruire la planète.

Constat assez amer et flippant !

Mais comment lui donner tort lorsqu’on regarde les actualités ?

Sébastien Bohler termine cependant son livre avec des pistes pour lutter contre cet automatisme néfaste de notre cerveau,

Notamment au travers de l’éducation et le développement de nouvelles (meilleures) habitudes.

Une thèse cependant controversée

Malgré l'engouement médiatique, de nombreux scientifiques se sont levés pour pointer les inexactitudes et les erreurs du livre.

Parmi les reproches généraux, tu peux trouver :

  • Interprétation erronée de certains des articles cités en source,

  • Certaines études mentionnées semblent peu fiables,

  • Catégorique dans ses propos et hypothèses,

  • Absence de retenue dans les conclusions apportées,

  • Mésusage des neurosciences,

  • Méconnaissance des sciences humaines et sociales,

  • Tendance à impliquer que tout est biologique sans prendre en compte l’environnement,

  • Le focus individualiste invisibilise voire nie les actions globales qui ont un plus grand effet de levier.

Parmi les reproches plus ciblés, tu peux trouver :

  • Le striatum ne contrôle pas le cortex ; il est impliqué comme d’autres zones,

  • La prise de décision ne se résume pas à la dopamine,

  • L’auteur fait des projections infondées sur le mode de vie au paléolithique,

  • L’opposition entre structure archaïque et structure récente dans le cerveau est obsolète ; les structures ont évolué conjointement,

  • L’évolution a aussi favorisé la coopération (et pas uniquement la compétition.)

Bref, ça ne manque pas ! 😅

En quoi cette bataille me concerne ?

À ce stade, tu dois probablement penser :

“Alex, c’est intéressant.

Mais tu n'es pas plus spécialiste du sujet que moi, ni neuroscientifique, ni sociologue.

Comment peux-tu prétendre quelles thèses et hypothèses sont justes ou fausses ?”

Et tu aurais tout à fait raison !

Tout ce que je peux constater à ce stade, c’est qu’il y a divergence des propos.

Et ça, c’est intéressant à regarder.

Surtout concernant la manière dont on fera confiance à une hypothèse ou à une autre.

Tout d'abord, si tu connaissais la théorie du striatum,

Peut-être as-tu fait des choix pour changer ton comportement.

(Comme de nouveaux modes de fonctionnement au sein de ton équipe.)

Du coup, il est peut-être intéressant de les remettre en question s’il s’avère que leur base est fausse.

Ensuite, je pense que c’est une belle illustration du biais de cause unique.

Car même si je ne suis pas spécialiste des sujets pour pouvoir trancher envers une hypothèse ou une opinion,

Je peux en revanche remarquer :

  • Que des spécialistes sont en désaccord (il n’y a donc pas de consensus – merci captain obvious 😂)

  • Que certains nuancent leurs propos (plutôt que d’être catégoriques,)

  • Que d’autres, lorsqu’ils s’expriment pour se justifier, attaquent plutôt la personne que les arguments (ce qui, de mon expérience, n’est jamais bon signe.)

À cela, je peux modérer par rapport à mes connaissances sur :

  • Évolution et ‘naturel’ versus environnement (par exemple le talent ou la réussite,) et

  • Les addictions de notre cerveau à certains neurotransmetteurs (il y a la dopamine mais pas que selon certains experts…)

Sans compter les biais cognitifs 😆

C’est quoi ce biais de la cause unique ?

Comme son nom l’indique, c’est la tendance de notre cerveau à ne rechercher ou ne favoriser qu’une unique cause à un évènement donné.

Ici :

Si on affronte des problèmes de changement climatique,

C’est parce que notre cerveau nous y pousse.

Sous-entendu : et rien d’autre de significatif.

Si je m’arrête à cette cause unique,

Ma prochaine étape sera d’aller chercher des informations qui vont me conforter que cette cause est véritable.

(Encore le biais de confirmation !)

Et je vais alors rater tout ce que les codes sociaux nous ‘poussent’ à faire.

(Comme respecter ou valoriser "ceux qui ont un SUV" et non "ceux qui ont un vélo".)

Ou je vais rater les lois et les réglementations qui orientent notre actions individuelles et collectives.

(Comme taxer les voyages en train mais pas ceux en avion.)

Je pense que tu comprendras qu’avec tout cela,

Je suis plus enclin à pencher vers la nuance et les facteurs sociaux et environnementaux.

Plutôt qu’une explication centrée uniquement sur notre cerveau.

Ce qui ne veut pas dire que j’ai raison,

Ni que les mécanismes cérébraux n’ont aucune responsabilité dans le problème.

Juste qu’ils ne sont pas probablement pas la cause unique.

Je pense également que tu comprendras que j’ai grincé des dents la première fois que j’ai lu cette hypothèse sur le striatum.

Et que j’ai cherché en savoir plus.

Ce que nous devrions tous faire (moi le premier !)

Surtout lorsque nos connaissances sont limitées sur un sujet.

Au passage, pour la thèse du striatum et son succès, je pourrais aussi parler de :

  • L'argument d'autorité (le parcours et l’aura de l’auteur, les nombreux médias qui reprennent la thèse sans analyser les avis contraires,)

  • Le biais de confirmation (éviter d’aller confronter son hypothèse à des spécialistes du domaine,)

  • L'erreur fondamentale d'attribution (tout mettre sur le dos du cerveau, puisque –biais de disponibilité– le cerveau est à la mode,) ou encore

  • Le fait que notre cerveau s’arrête à la première explication plausible (qui va nous empêcher de penser plus loin.)

Mais ça sera pour une prochaine fois

 

En attendant, si tu as envie de creuser par toi-même, cet article est un bon point de départ (qui pointe vers d’autres articles intéressants.)

Tu peux aussi réaliser :

Défi de la semaine

Pense à une situation où tu as identifié une cause unique.

C’est à cause de tel concurrent que nous…

C’est à cause de telle personne que j’ai…

C’est grâce à mon action que…

C’est grâce à nos efforts que…

 

Prends quelques minutes pour creuser s’il n’y aurait pas d’autres facteurs qui pourraient entrer en jeu.

Notamment des facteurs invisibles au premier regard.

Comme le contexte ou l’environnement dans lequel tu baignes.

(Pense à un étudiant d’un milieu défavorisé qui, à compétences équivalentes, réussira moins bien qu’un autre parce qu’il n’a pas de moment à lui ou de pièce pour étudier calmement.)

Tes commentaires m’intéressent !

N’hésite pas à m’envoyer un message pour me dire :

  • Ce que tu as apprécié,

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  • Ce que tu as testé,

  • Ce qui a marché,

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  • Ce dont tu aimerais que je parle dans une prochaine édition.

Je suis à ton écoute et je te répondrai avec plaisir.

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